Affichage des articles dont le libellé est Nicolas Roeg. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Nicolas Roeg. Afficher tous les articles

dimanche 5 février 2017

Silencio



[...] un Verdun des Lettres, [...] - J.A., La Chanson d'Amour de Judas Iscariote

Сонет
Мы снова проживаем у залива,
и проплывают облака над нами,
и современный тарахтит Везувий,
и оседает пыль по переулкам,
и стекла переулков дребезжат.
Когда-нибудь и нас засыпет пепел.
Так я хотел бы в этот бедный час
приехать на окраину в трамвае,
войти в твой дом,
и если через сотни лет
придет отряд раскапывать наш город,
то я хотел бы, чтоб меня нашли
оставшимся навек в твоих объятьях,
засыпанного новою золой. (Joseph Brodsky - Стихотворения и поэмы, 1962)

Sommes à l'aber de l'asile rebelote venus résider,
Et prolifère la traînée des nuages au-dessus de nous,
Voilà que souverainement synchrone tartarine le Vésuve,
Et que le pulvérin descend de selle sur les ruelles
Que les vitres des venelles pierreuses sans jonc de joint se mettent à vibrer.
Lorsque l'un de ces jours nous prendrons perpète sous la pelle du poussier.
Ainsi je voudrais, chasse-litote de cette heure débile,
Parvenir aux confins exocrines en tramway,
M'incruster à mon tour, t'entrevoir sous ton toit,
Et si au bout d'une centaine d'années
Il prend à une brigade de pionniers de fendre l'ocre carapace recouvrant les rescapés de notre ville,
Alors je voudrais qu'ils me trouvassent
Serti pour l'éternité dans les anneaux du liber de tes bras
Couvert des épis et feuilles de nouvelles ailes de cendres. (To Emma.)


Crise de vers pillés, Brodsky marchait de tout temps pieds nus sur le papier d'une ordonnance calcinée écrite en personne par le pharmacien général de son ordalie.
La désacralisation soviétique entreprise au débit de l'espace réservé dans son étrange pays à la poésie devint son dépit quotidien.
Comme s'il était partie prenante d'un nouveau film de Scorsese tiré du roman de Shusaku Endo, les autorités lui donnaient, lui offraient, dans un bel aujourd'hui toujours renouvelé, son fumi-e de ce jour.
À l'encontre de la posture habile, d'une certaine façon facile (de celle que les hommes du monde libre de l'avant 1991 voulaient tant voir dépeinte à l'est), du tranquillisant anti-héros, lâchant tout derrière lui des anciennes traditions, archétype de l'homme détaché, lutteur impeccable fagoté de jeans délavés et auréolé d'une cagoule de brume de rock'n'roll, pourfendeur de la lèpre 'consumériste occidentale' (une pose que ne reprit pas entièrement à son compte le grand Havel, qui le paya en retour, un socle de plate infatuation dans lequel même l'infusible Volik Vyssotski refusa qu'on lui coulât les chevilles), il pensait que la poésie requérait de celle ou de celui qui en acceptait la charge un haut degré de responsabilité. Matthew Arnold parlait de high seriousness à ce propos. Nous en étions-là avec lui.
Alors, feignant peut-être autant de franchir la porte du classicisme de la forme que celle de la boutique absconse des ruptures de lignes, sans rien pendre au clou du 'délyricisez-moi-tout-ça', à cheval sur la faille béante séparant Maison Mourousi et Couvent Smolny, il choisit de flotter l'émotion entre point d'éclair et d'inflammation, même lorsqu'il se proposait d'en faire péter les volcans de verre et dresser les geysers transparents, au risque d'ébullir la région des Lacs, d'en faire jaunir les acides et jaillir les ponces comme des entrailles d'un grand nord-ouest américain. Désossement des commandes habituelles du conditionnel de la gangue russe. Une manière de pincer la joue de Wordsworth enfoncé au plus profond de ses rêves de mémoire collectée dans la plus parfaite transquiètude.
Intranquil impractical distempered prank, typical of the russian poets, maybe.


[The livid faux-dream of last sunday.
Non encore endolori.
Ancora non addormentato.
Choléra des Sporades de la nuit que décolore un satori.
As I roamed around Venice.
The forces of evil were astonishingly neat, cristal clear, you might say, like chrome steel, even in their somber masquerading. Seemed to look at me with Mosca's eyes.
Enwrapped in black flags the men won't rape the Yazadi girl nor behead her father, won't amputate the hands of her two brothers aged ten and twelve who refused to execute five civil servants of Venice's embalming chapter in front of their families near the Giudecca.
The death principle does not appear that much solar.
They remembered the times when the Inquisition got a new vigor, when its judges became avid readers of the 1984th book written by Orwell over the night, and how in the morning were taken aback by the sharp realization everything in it pointed to communism, how their black silk Freisler gown was tinted with Vychinsky's white from the very beginning.
Very bad and lousy amateurish VerBrechter, still confusing Verfremdung with Entfremdung.
Putting La Fenice back to the ferns of the laguna, where the newborn Hebrew boys could be filtered by the thousands, at each and every tide.
Meistersinger von Nova-Pietroburgo calling a Jihad against the Svengalis of all trades and cradles.
Indeed, no, they were not of that hue.
Volpone had been dead and forgotten for ages by now. They wanted to show me in under the porch of the famous speckless Black Honey Pot, pride of the floating city, chanting my Kaddish at the same time.
I couldn't recognize the faces but the smiles looked familiar to me.
A cool estrangement which propitiated the easy heritage of a leaning death and rendered real all the meat offerings of its rhetoric.
Caught the eye of
Gian Maria Volonté's Terrorista, the grin of proud old Herr Stolz, the enormous pulmonary fright of Nicolas Roeg's acting father and architect, McFly's unscripted blinks...They made forages for the flies' families.
The
nero su nero sensation pertained to the awful mass of broad daylight, which was melting all the monuments into a warm black blood lava that only infrared Maglites could reveal to the vessels of the dried human eye.]


Un sentiment de déjà-oublié avant, comme disent les américains, plus que de dégâts déjà bus.
Plus impressionnant encore que lors de la Grande Inondation de Florence, l'eau sentait fort, l'une des meilleures houilles millésimes des caves d'une méga-Acqua Alta debout sur le chtonogramme de ses sources tièdes, imprégnée de larmes couleur isabelle des yeux de Pastoureau, Arasse n'ayant fait aucun legs visuel comme à son habitude.
Une viscosité de salive de varan, de salinité lisse, sans aucune particules liquoreuses à la surface. Il était devant le palais Cavalli, complètement -- et seul pour l'instant -- recouvert par l'élément liquide, bâtisse jalouse de sa nouvelle densité comme cela peut se deviner à la contenance que prennent quelques uns de nos membres lorsqu'ils sont gorgés.
Les fenêtres semblaient devoir rester noires, les tentures ne pas frémir au passage de la seiche et ses oscillations.
Un monticule de lampes de chevet le convoitait comme s'il était fait de l'argile funéraire des statues Haniwa.
C'est vrai qu'il a les semelles en plein sur le ventre d'un anneau d'argent.
Il sent le petit noyau de son âme de fer se contracter par surcroît d'absence de terreur et frire comme le fit un jour celui de la lune alors qu'elle tournait comme un oeuf autour de la Terre.
Tout est onction crue, rien de la face du doigt ne porte trace de gras, de mouillure, lorsqu'on le glisse sur la chair des meubles patinés de leurs translucides solubles.
Quelqu'un dut enseigner à la poussière le mystère de la carcérale respiration placentaire alors qu'on la retirait des alvéoles de son pensionnat.
Il y a toujours plus de fines membranes qu'il aimerait franchir, en pure perte.
Traînent par terre des morceaux d'escapes, des vestiges de capsules.
Un opulent cadavre de truie, hommage à Maïa ou sus scrofa moabite, tapisse le seuil de l'entrée, vont-ils exiger de lui qu'il l'éviscère, l'encens des idoles en suspens dans l'air, préparent-ils d'autres mets abominables, mangent-ils des souris ? Il est admis dans une chambre, on lui dit que sa mère tousse beaucoup, son poumon gauche est en portefeuille, elle qui pourtant ne fuma pas, la pollution, le tabac passif, transpiration secondaire, que cherche-t-il encore à se dire ?
Comme l'un de ces visiteurs d'aquarium des montagnes hollandaises dont se moquait Kafka, il vient à la toux et la toux vient à lui dans ses habits de mildiou, de white-rot.
Les petits champignons du gel se dilatent comme des anémones sur le dos de pouces-pieds à même les fosses de nos squelettes portées à fleur de peau.
Compassionnelle amertume.
Consumptôr magnus.
Il fait un dernier pitonnage de coton allongé sur une balle éventrée devant la télévision.
Le combat des deux auxiliaires de l'alliance portuaire ne le passionne pas, ni la victoire des pétanquistes de la boule de cuir volante. Il oublie sans déplaisir qu'il fut le meilleur buteur de l'un de leurs tournois. L'annonce faite à Miss Universe, moelleuse dame bien formée, presque déjà médecin ou dentiste, éparpille quelques neurones à son tympan. L'interface d'Ikono ne cesse d'érotiser le silence en le faisant de force coulisser sur des cartons de présentation oranges, ses lettrines se fardent les dents de noir en puisant dans les petits pots de leur police.
Il n'y a jamais d'images.
The Museum Channel passe un portfolio des oeuvres du Delacroix jeune, le son n'est pas monté, les illustrations musicales sont fondues.
Sautant Gong, il s'orbite sur Souvenirs from earth, s'infuse la vision d'une jeune femme nue au milieu d'une salle, un grenier de maison de couture peut-être, tendue de mannequins qui pourraient lui ressembler.
(Ce n'est pas la Melissa fameuse, qu'il n'a jamais vue d'ailleurs.)
Cela lui fait songer à une mise en scène offerte à l'écrivain Jacques Laurent par un réalisateur ou photographe l'ayant abandonné dans un lieu, une situation, de même nature, il y a mille ans.
Il souriait, l'homme à cet instant sessile, heureux d'être en cette immobile arachnéenne compagnie, le robot d'accompagnement sentimental est l'avenir de la sexualité des mâles et femelles de sapiens extraction, et cela sera tellement bon.., paraissait-il nous dire entre deux expirations de la fumée bullaire d'un élément liquide que son arbre bronchique venait d'irrumer.
Longs cheveux châtains, bel ovale, bouche opaline filée d'effets vermillons aux déchirures secrètes, la fille a la peau blanche bleue d'un veau hier encore froment de salon.
Elle prend des poses inhabiles à dessin, globule et protubère du haut du blanc des yeux, vidéovitrage laiteux magnifiquement bombé d'une actrice novice, saisit la main désarticulée d'un pantin et la dépose sur son sein.
Son ventre est harmonique et plat comme la table pleine d'une Flying V, lui, ne sent plus rien, ni son manche de Gibson, ni la pulpe de ses mains.
Elle a la poitrine grossie de deux plateaux de porcelaine au balancier immense, acescent comme l'encre des acides d'une sève dont la sanguine majeure tourne à l'outremer, mordant comme le regard de tragédie d'une vache étrusque.
Les tétins calmes pourtant au bord des venelles roses, leur fourrure de vagues accrêtée sur les pilotis d'un possible repast des magnétiques jouissances d'une mémoire morte que sucent les algues.
Le menu trident de son sexe est constellé d'étincelles centrifuges giclant d'un ressort d'écailles de galuchat insaisissable, qui se donne licence de luire lorsque son amant de Venise désenveloppe les cavités obscures de ses mangroves au שמים de nouvelles racines, fils constamment étirés vers le buste par le palet du nombril.
Elle met en joue le portier des invisibles suies de sa chair de nuit, livide neige des beaux visages éteints de Bergen dans la pelle du tracteur.
Ne pas être malade avec les autres malades. Elle se love sur le sol, ses seins retournant à Prague, puis dans une chambre, puis au fond d'un lit, puis d'une certaine façon sur le lit, d'un seul côté du souffle, puis sa poitrine ne se lève plus, ne bouge, et puis plus rien.


Art of the Nebel.
Le poète est un jeune homme que sa mère emmène pour l'exposer devant la porte d'un monde dans lequel il ne saurait entrer. (Pàn Kundera.)
La falaise,
chacun y monte sa Troie magique, s'épargne au plus pressé, Onival qui mal y pente, une explosion de pensées, comme dirait D.H. Lawrence ? Là nous nous dirons Amen et irons cimenter à la salive de lépidoptère les pierres de nos fleurs tombales particulières.
Comme le cran d'un cutter sur un iambe de bois, les tenants du Ruban bleu coupent la soie de leurs records de basse mémoire, ces espèces de Buridan, les émois ballants, le blanc et l'arrière blanc de la bande rouge de l'affranchissement personnel. Incapables de saisir l'Allemagne de 1933 comme le pays désobéi par excellence, le pays du pari faustien, mené par les hommes qui réduisirent leur Judas à leur propre imago de scolopendre, eux dont le baiser tordu se vidait depuis un manque de lèvres dans un incessant va-et-vient, de ponts aériens, d'envols de bave d'une logistique de mots.
Sourds aux rappels de Max Weber, déchiqueteurs de l'élan humboldtien.
Jusqu'à faire taire le sens.
Tout en haut d'Ault, Brodsky verrait le travail de la mer, les grands requins pèlerins ou dormeurs aveugles à force de nager sous le dôme marin du Reichstag des abysses, les frères de la côte pirates d'un fier manque de délicatesse acquis à leur conscience, non hypersensibles, méprisant les derniers tabous, prêts à toutes les extrémités pour bouffer le monde fût-ce à perdre son âme, maîtres des véritables vertus de l'utilitariste Nebel assourdi.
Avec leur airs de démerdards de Comte de Christo Monte des non-lieux, avec leurs mines de chaussetiers des façades de l'au-delà du Kilomètre Zéro, ils foulèrent aux pieds la grande méditation catholique des temps jadis pour faire leur vin des petites devinettes séculaires dont nous sommes friands aujourd'hui.
La peur du travail de la réflexion, le Christ trempé dans l'urine, Judas élaborateur des cinématographies clandestines de Jésus, transhumanistes préconisateurs du délaissement des vieilles courses de la lune dans les champs spatiaux du courage mental et physique, il suffit de laisser une chance à nos penchants liminaux, verbaux, lexicaux, et les rendre miscibles à toute ouverture et glisse de la langue vers la possibilité d'une profanation.
Il n'y a plus de place pour la sacralité des êtres et des choses.
Pour la droiture de sa falaise (ils ont enfouis sous la terrasse et le restaurant de Branly nos Dogons intérieurs), pour qu'y naisse le vent.
Nos nouveaux Bergson sont des serpents à klaxon qui sloganisent le temps, les minutes du paysage. Ils possèdent peut-être leur Proust, leur Faulkner, qui tous assistent à leurs conférences, voient leurs expositions.
Ils s'occupent de voiler l'espace dans les poses à double-face de leur temps de colle surhumain, troppo oltreumano.
Einstein, qui lui-même ne se réconforte pas de voir sa relativité lui sauter hors des mains, dirait peut-être : Le paysage de ce genre de philosophes n'existe pas. (tapé en partie le lundi 31 janvier 2017, traduction Hubert Perseault : 2006)


For the silent record

dimanche 1 novembre 2015

Kamakura Express

436_ Sweet Sisters' Morphing


À une fan absolue de l'Ozu-san 

My mu is your 'd rather not to not to move
Your Be is my nothingness about to see pure blue
A constant feel free falling into an inner ionic nu
Leading to you, harnesses on a rove
Still mauve meander-man without a clue
Your perceptive Do does not need address to prove
Le grand geste et souffle de l'esprit qui trouve
Sans mentale jonglerie le passage du nuage et dénoue
L'Empierrement mou de la nostalgie
Discontinue
Qui emmura vivante l'ère Meiji
Dans les chemins de ronde d'un rail mandchou

 スカショ:
Écouté dans le poste un critique taguant l'auteur de Notre Petite Soeur de faiseur de chromos, d'illustrateur de panneaux fusuma inspiré par des restes d'affiches tombées des cartons d'un vieux rescapé, star de l'école Hara ou mieux, de celle de Kanô, pourri d'honneurs par les jurys d'un Edokoro de France et de Navarre. Un petit soufflet entre les lamelles de l'armure du samouraï de la publicité japonaise Kore-eda, le spécialiste des commercials aux couleurs pétantes, sans doute, les journalistes aimant bien sortir les pouces et appuyer à l'endroit où cela est censé faire mal (les premiers doigts dressés sont un signe de mauvais augure au Japon), pour creuser un trou entre les karuta et la brigandine de la côte de maille. 
Je pense que l'oeuvre du cinéaste japonais pare cette attaque et fait rouler les assaillants dans la sciure de leur propre conscience extralucide, réduite aux aguets comme celle des chefs de gare. Le choix de la jeune Hirose Suzu (même prénom que son personnage de petite soeur de quatorze ans) est peut-être déjà un énorme clin d'oeil-chink-in-the-armour, peu visible pour les gaijins, puisqu'elle est une actrice de spots de pub très prisée par les agences du pays. 
Les Trois Soeurs (autant en emporte leur Kaze dans le chiffre quatre, Shi, synonyme de mort, puisque Sachi, l'aînée, utilise le terme Yon lorsque les filles se réunissent dans la maison cernée par l'absence des sylvains et des faunes) vêtues de noir-cherry-jay (on voit se refléter pendant quelques secondes sur l'élégant sergé de leur costume les visages pâlis des trois frères de Akibiyori, Fin d'Automne, le film d'Ozu de 1960) notent bien les choses du Japon d'aujourd'hui, celui des garçons qui ne s'engagent pas (vrais Hommes fantômes, que la peinture du passé ne pouvait décrire que comme des femmes, sujets traditionnels renversés par les images du film grattant les écailles de l'actualité), la jeune Suzu pouvant elle aussi nous renvoyer vers la Venise d'un Visconti gravant, cette fois-ci dans les rivières rouges du cuivre blond teignant les sables de la lagune, la nouvelle du grand Mann, lorsqu'on la voit dans ses habits d'écolière, petit marin de péninsule habitant la montagne magique des détritus de souvenirs qu'il faut gravir chaque matin dans la brume des fondamente et callette grises comme les traces de mémoire effacées par l'architecte John Baxter, noires comme celles laissées par sa femme Laura dans le film de Nicolas Roeg, léger hybride d'un Tadzio bruni des rayons du soleil d'Ise ricochés à Trieste, ou peut-être simple revers d'Andrésen qui vécut longtemps au levant, la musique de Yoko Kanno rappelant, adagietto, dans les précipités harmoniques de son Sehr Langsam, la IV de Mahler (un peu quand même dans le piano.) 
Puis vient la référence suprême, celle dont la balle de maquillage doit faire mouche entre les deux yeux, les plans patinés de fond de teint plâtreux de Notre Petite Soeur dégoulineraient de l'ancienne palette de l'Ozu-sensei. Comme si Kore-eda ne savait pas que le maître fût enseveli dans le jardin de l'Engakuji situé à Kamakura sous la dalle d'un Mu aux non-remuements réflexes toujours nuancés ... 
Si Ozu était un macérateur-né des sentiments glissés dans le cadre des images comme on fait coulisser dans le washitsu, enténébré par la mue de filaments des ombres sinueuses, les panneaux agglomérés de papier épais séché au soleil de 4 heures du matin ou fibrés de bambous ancestraux de la forêt orientale de Kyoto, Kore-eda paraît filtrer un flacon d'hydromel de vin de prunes, non plus à partir de l'inerte chorégraphie des remous internes du corps mental sur son noyau, mais depuis l'essence des visages aux reflets blancs pétales très placidement plastiques de ses héroïnes dont l'héroïsme caché consisterait à chercher en vain l'héroïque dans la vie, par des plongées de la caméra au stylet subtil, non perforant, dont les touchers de duvet les scarifient à peine, préférant condenser la largeur des focales, de celles choisies lorsqu'on veut rendre l'expérience d'un paysage. Ses contre-plongées écarteraient de la même façon l'idée d'enfermement, flottant dans les pièces dépressurisées par les tremblements de l'avenir qui s'afferme absent plus que rétif, sans qu'il ait la possibilité d'infiltrer de ses salpêtres la vieille maison des filles orphelines, un lieu prêt à se signaler aux feux de l'affection des Otakus que les dieux Lares du pays déclarent de moins en moins devoir traiter comme des sujets maladifs.
C'est peut-être exact qu'au Japon la sensation masculine, à l'image des centaines de milliers de maisons inhabitées, serait désormais vacante, déserterait la place. Les gris de mer du Nord, les verts olive et les rouges passés, plasmas aspirés ou crachés par la caméra de Kore-eda auraient-ils été fixés-là pour soulever les opercules d'un pays, à la respiration de carpe séculaire, comblé des gaz rares d'un oxygène antique recouvert de feuilles de bulles d'or, que l'amour de l'eau et du sol enlace, qui se rêve comme une immense ville-Musée, livrée à ses muses et ses amantes, ainsi que s'y résolut Paris selon certains, alors qu'il est déjà peut-être tel depuis le shogunat Tokugawa ? 
J'ai vu le film à l'extrême fin de l'été dans une petite salle d'Osaka. Un carton d'audience au Japon, le fait qu'il soit sorti tout frais imprimé des planches d'un manga célèbre ne nous expliquera rien. Kamakura est un ancien lieu de résidence de Kawabata (toujours lu ici), qui connut lui aussi une jeunesse déchirée par les deuils. La mort ne le quitta jamais, c'est sans doute la chose qu'il a le plus aimé contempler, même voile transparent décalaminant le vent des cerisaies alanguies comme les calmes précaires des baies adriatiques qu'allonge la lumière de midi sur la peau des femmes, même battement muet sur les parois de son coeur des volets de la camera obscura du vingtième siècle.