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samedi 18 octobre 2014

"Tant m'abelis vostre cortés Babel..."

348__"Tant m'abelis vostre cortés Babel..."



"Les rues noires où fume la lampe à kérosène
Ont englouti framboise, neige et glace,
La sonatine soviétique s'y égrène
Au souvenir de l'année vingt."
Ossip Mandelstam. Poémes 1920-1928.

"Et n'y puis rien changer"
Jean-Louis Murat, "En direction du crest."


À Muse,


Nocher du ponton des coeurs qui battent la chamade,
(Royale noyade au Chambon
De l'une des roses sauvages en bouton,)
Il nage vers elle comme jadis les sauveteurs de madame Ramade.

Des rives de la Havel aux sources de la Saunade,
De Babelsberg, par les reflets des visages de cinéma, jusqu'à Clarmont,
Dans la course des sourcils du Sancy, traces de blason,
Le film fleuve de l'enfance de la vie s'efface au saillant de la cascade.

Dans la dilection du trait
Mille hasards de faits rares,
Le peintre saisit le coeur ordinaire des roses.

Choctaw des rasades, les flots de lune percent le brouillard,
S'appelait-elle Marie-Jeanne, la fille au teint de craie ?
Son sang se noue, son aura se noie, dans un appel d'air, la noire hématose.

Le revolver à poils de chameau blanc avait la passion des murder songs, 
À force de battre à ses oreilles le sang chauvait et mouillait les pavés de l'Île Longue.



À Yseult

J'ai le même sentiment que vous, il m'a semblé voir marcher Tristans dans Babel. La sourdine que Miles dévisse à sa trompette n'empêche pas Julien de faire passer ce qui le lie à Annabel. Qui naît à bout portant dans la nuit des formants doit savoir abreuver les harmonies, des moins fluettes jusqu'aux muettes. 
Vienne la cavalière de la pluie, lézard à la gorge du désert, dans le djebel des onces, au mont des pardes, guépards et jaguars tapis dans l'ombre fantôme des villes, ronces de prières sous le pelage de neige du lierre. Voiture de la photographie, Oldsmobile, Cadillac ? Tozeur des Cathares, Borj rebelle de Padirac, ambulance gardienne des sons, fourgon des impédances à Tunis, station-wagon du bassiste de Johnny ? Mais qu'allait-elle faire en Jordanie ?  
Bleu des signes, sang des vignes, la chevalerie rouge de dix mille ribes, large fleuve de groseilles, cassis et myrtilles, coule dans les yeux d'Isaac, et porte vibes aux seins légers des filles. 
Cool memories, remémoration des momies, soul fantôme mental, chanting à la ferme, Om mani padme haum, chair de houle sur l'épiderme, même les touristes nous parlent en anglais lorsqu'ils s'autorisent, foule de pentimenti en sandales, drool continental, soif d'ordalie. Dans la file du temps, recherche du nombre secret des atomes que le vent mémorise. Réveillons les ptérodactyles et tous les dinosaures à plumes, clonons les calderas et les cratères des volcans dans les clades du lendemain versant bassins, qu'importe le costume pourvu que l'amour humain se voit même de loin.
Main à enclume, main à Charon, dans le tonneau de l'eau qui fume, de forgeron, il ne noiera jamais sa main. Transparait le dénuement des chainons manquants dans le dénouement du chignon d'une chanson, écheveau du soleil levant.
J'adore la livrée de ce nouvel album, la base dix lui va comme un gant sur quatre fois cinq doigts, le système vigésimal était peut-être la distribution préférée des Celto-gaulois, flux musical qui permettait de contourner les bastions des oppidums. Mais justement, rien dans Babel ne fait système, les vingt chansons forment un dunaire cordon, la mielle d'un auto-nombre à tourner fous d'autres labels, maîtresse de fluides qui auraient dissous la vase et rendues fertiles les boues sans limon du Circenses et panem. 
Dans la direction du Crest fut ma porte d'entrée, dans chaque disque de Murat il y a ce titre à l'extraordinaire loi vaudoue, quelque chose qui vous extrait au grand dehors tout en vous replaçant au centre de l'aire du chant intérieur de votre être, au coeur de l'anticipation de votre choix. Dans cette chanson Murat lui-même semble défléchir l'objet de sa contemplation (ici la nature) et se tourner vers l'écouteur, abandonnant l'idée d'un art poétique au sort calcaire des peurs diluviennes, laissant sur le bas-côté les trucs des faiseurs, pour nous mettre dans le champ d'une observation, la nôtre comme la sienne, inconfortable commune pâture, creuset d'une étrange jòi.

Mais qu'allait-elle faire en Jordanie ?

samedi 22 mars 2014

To the MAS Flight 370 Airport Renegades

Morituri Volatiles Te Salutant
312_On atterrit vraiment jamais d'une chanson de Murat, même dans les lignes du sommeil des airs de Malaisie on a toujours la voix de Jean-Louis qui bourdonne dans l'oreiller de notre éveil interne. Les aéronefs manquants se laissent pousser le duvet qui avait fui leurs ailes dans le terne sevrage des plumes, et dans les cieux de l'Aleph les ravitaillent des oiseaux-citernes. Les pilotes, parfaits sieurs de Saint-Amant, savent ce qu'ils font lorsqu'ils mettent un cd, un vinyle, une cassette, dans le lecteur commun d'écoute aux instruments de leur taxi volant. Cela n'a rien à voir avec la prétendue torpeur des aiguilleurs du ciel arverne si le train bleu des avions long-courriers se perd au-dessus de la Micronésie des volcans et des Puys des îles Andaman endormis par les cris (à faire péter les boulons et les agnans des carlingues des zincs blancs) des poissons-papillons du massif-archipel du Cézallier, il y a des centaines de siècles avant. C'est une simple affaire géomusicologique, personne n'a donc entendu parler de la "discontinuité de Mohorovicic ?" Au-dessus de l'Auvergne, vous êtes nus sur le manteau de pluie de la lave terrestre. C'est tout à fait normal que quelque chose de vous-même se vaporise instantanément dans les limbes rupestres lorsque les vents vous portent vers elle. Pour beaucoup de journalistes, qui tiennent à ce que cela se sache, le fait de perdre ses repères dans le trafic utilitariste aérien, de dévier des couloirs aux grands airs connus, d'avoir un peu chaud dans les cycles du sang, de se sentir le cerveau reptilien devenir rêveur dans la mémoire cache des lobes planants et les membres intérieurs tracer des pas de danse sur le bleu de l'océan, tendraient à tout dépeupler, rendre le monde non avenu et muet comme l'est un bon indien. Pourtant les passagers du vol MH (comme : Murat des Hespérides) du Boeing 777 disparu dans une tache de nuage en forme de lyre ne se plaignent plus de n'être pas repérables dans la brume de vers échoïques, à l'infaillible recours, qui les entoure comme les montagnes le sont par les vires, le verger qui les abrite et les hume est splendide, ses filles extra-lucides, ses bergers sincères et généreux, même les enfants fument, ses Johnny Frenchmen analogues parlent angliche sans accent barbuleux, et les Sylvie Frenchwomen écrivent le Tagalog avec succès sans le secours de fiches. Cela s'appelle "gagner l'aéroport céleste" avec son corps, avec son coeur, quand l'artère carotide a de beaux restes d'aoriste dans la battue du temps décalé qu'elle retarde jusqu'à ses sinus. Moi et ma part de disparu, le gagnons en continuité depuis l'album Vénus.