vendredi 11 mars 2016

Looking For Raito


Raito est rentré la-baït, sa mère le chercha de toute sa vie
pendant deux jours, dormit dans la voiture toute la nuit. Guetter les mouvements de la jujube amère rouler comme un galet dans ses entrailles, pendre aux aurores les verbes qui ont horreur de l'action, sentir dans l'air l'odeur de son garçon, derrière les levées crevées, écouter son petit cri d'alyte.
Ce matin une ama et un pêcheur des socles abyssaux brûlèrent des bâtons d'encens puis joignirent les deux mains, comme ils le font tous les 11 mars sur la plage de Tairausuiso, district d'Iwaki, préfecture de Fukushima aux pâtures de suies, promontoires aplatis dans le dénuement des repères, depuis qu'ils virent, quelques jours après la furie de marbre salin, le corps d'une jeune fille rejeté sur le rivage quintessenciant, par sudation, le travail de la mer.
Des fleurs de jasmin flottent sur la baie d'Onagawa, pour le repos des âmes que certains pensent encore saisies par le froid, à l'image des cygnes chanteurs d'Hokkaido pris comme Ponyo dans un bocal, comme en Aquitaine on conserve les cous d'oie, étranglées par les clauses de l'oubli, la surprise de découvrir que plus aucun souvenir ne les habite.
La catastrophe prend avec le monde ses distances, détend ses ailes, reconnaît l'aise virtuose qui plane, vassale des lointains, étonnée par l'envergure des traînées induites en l'absence de nouvelles portances.
Les femmes japonaises du Sendai devinrent-elles des icônes dans les plis des couvertures beiges qui firent tressaillir les cordes sensibles, caillots de la neige d'Annaba, jusqu'aux rives d'Hippone ? À la recherche de leurs petits anges elles ne demandèrent rien, alors que nous exposions, dans un éternuement de pollen,  le spectacle de notre belle stupeur générale devant l'écran de la télévision, elles déplaçaient les laisses de mer, retournaient le sable des solens, fouillaient des yeux l'élision des estrans. Alors que les débris déjà se panifiaient, elles filtraient et écorçaient du regard les résidus de boulange.
Aujourd'hui les autorités relèvent les murs de la jetée, veulent "revitaliser les zones".
Doko ni nyûinn shité imass' ka ?

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