lundi 16 mars 2015

Borélien

Transi de Louis à Saint-Denis
Inrime Jovis imperiis imposta Aureliano

À D. B.

378_La première fois qu’Aure-Alize vit Borélien, elle le trouva franchement mort.
Que la pluie décrût, enfin.
Elle n’aima pourtant pas comment le vent l’avait déshabillé sans remords.
Un coup de brise qu’elle aurait su toiser, d’instinct.
Elle avait des visées sur la brusquerie des risées que Zéphir, son pharmacien de mari en or, n'omettait jamais de mettre en branle afin de lacérer l’étoffe des hommes en grande incapacité de percevoir les enjeux que vivre vie des anciens romains exigeait d'obligatoire épopée à chaque surlendemain.
Une étoffe d’ex-héros désapé qu’elle avait vue cent fois transir plusieurs astres conduits à malemort.
Ceux-là la firent toujours désagréger un peu plus de la substantifique gaure d’elle-même, eux qui portaient le nom de princes des vents du Nord, sans avoir pu connaître le pouvoir érosif ni la saveur, d’Orithye, les baisers salins. 
Il lui semblait que du fond de ses yeux, sur la pierrée de cette tombe, tout à son inertie rude : Borélien l'inhumé la lamait.
Elle approuvait secrètement le regorgement hagard des points bouffis cousus à sa cornée qui lui tissaient encore beau regard.
Comme si elle avait, de cette inertie rude, pu détendre les deltas de l'ultime aplat des teintes que prenait d'habitude le trépas, lorsque de tout son poids sur un visage il se gravait.
Que Borélien la lamât, du couteau de ses yeux, de le sentir comme un rasoir sur sa peau miroir, ne rayait aucune des fibres internes à ses calcins, au contraire, elle avait forte impression qu'il lui renvoyait le lourd velours bleu sang d'un reflet éponge de ses cauchemars.
L'amour accru de Borélien devenait alors minérale acupuncture, de nature parfaitement transitoire comme il seyait aux grammaticôs pétrophiles, mais aussi le stratus sommital d'une aiguille mentale qui tatouait les paysages de son derme, maintenant veiné de morceaux de bétyles fondus jusqu'au magma, que la disparition momentanée du ciel en mouvement surgranitait. 
Nous aurons fatalement ventilé plus de biens à Comminges qu'en mon comté d'Aure, mon cher Borélien, rien de plus.
Elle subodorait Borélien reclus dans ses images fixes de poète.
Comme, pour un verre d'eau de feu, l'ordalie facile d'être jeté dans l'oeil du Tikkun calmant, d'un seul cachet de météore effervescent, mille et une tempêtes.
Que soufflait-il depuis bouche et trachée cimentées à sa luette ?
Fils caché de Notos, il s'entendait comme personne à semer son ancienne famille immobile et à ne point laisser derrière lui les Thraces.
Un peu flottant dans son costume de nautonnier cornu de la pierre étanche et ponce, Aure voyait à son breveté sarcophage qu'il était expert dans la traversée des amours sans écumes, qu'il lui proposait un passage sur le radeau, certes creusé d'ions de balsa volages, bateau sans étrave ni fronces, à l'étage volontairement biplace.
Elle se disait...Elle se disait : Ce Lapis Invictus m'invite-t-il à scarifier l'évent de ma vie pour lui et son être lithographe ? À sacrifier la douceur des vents passereaux sous les serres de l'aigle en béton des plats typhons de sa nouvelle religion ? Elle se disait : Bizarre affection de la pierre qu'invisible lierre de lichens enlace.
Un Vulcain, Hercule en l'homme, Morphée des pavots de la menace saxifrage, nuées ardentes à vive demande orphique de fusion, absolument incendié de pouzzolane sur lui-même, se dit-elle une dernière fois avant de regarder, pendant dix-huit ans, se mouvoir les ombres de son testament d'Eurydice dans la glace. 
Madame, monsieur Borélien c'est moi !, crurent entendre crier Blanche-Aubée et André Tramontane, de la bouche de l'écrivain -- saisie palpitante par le coeur du gravier qui coulait, à son exo-lit de mortier, personnages et roman, sourd transit épiphane --, dans un munchien écart que grillageait le noir espace d'un soupirail à la trappe d'escalier menant au caveau du Lulli's Bar.