mercredi 16 mars 2016

argentée ماي

Quête de l'eau des images de Syrie anciennement argentiques


Juste après la vision du documentaire Eau Argentée d'Ossama Mohamed et Wiam Bedirxan (France/Syrie, 2014)
To Simav  
Ironie du sens couché,
Maïeutique du sang caché,
les chancelleries européennes et le DoS n'en sont pas encore à prendre la sécheresse de la lecture du Théétète pour urgente, qui les payerait trop comptant.
Ils préfèrent laisser leur envoyé retomber de Cratyle en syllabes,
enfouir la mathématique des diplomates de l'auguste crypte dans le sable des calculs arabes,
comme le fit l'impavide déesse de l'infra-frisson, ex-Secrétaire d'État, du ton des messages crispés de Chris Stevens, l'honneur de l'expertise du Parti Démocrate à Benghazi, dont elle regarda débiter la carcasse en direct depuis le magasin de sa boucherie,
s'asseoir en session plénière à l'ONU avant qu'il n'œillade un yellow cab
et ne rentre à son hôtel vérifier comment une nouvelle fois le dernier épisode de House of Cards l'aura pris de vitesse et doublé sur la voie rapide de sa gaucherie.
Filets d'eaux argentées,
liquidation des malheureux ilotes,
terre natale non arpentée,
"Liberté je glaise ton nom avec l'ocre des cris restés fendus, muets à la glotte,
comment dit-on rouge en kurde ?
Rrêch, noir se dit Sôrr."
Essorage du silence qui s'endort.
Un léger bruit d'eau figé fuit d'un robinet qui ne rend pas sa transparence absurde.
Terres fatales, sérial limon,
on se croirait dans un livre de Thimothy Snyder.
Le petit garçon du film aurait-il raison ?
"Les rues sont comme pendant la nuit mais avec de la lumière."
Cueillage du verre carmin au bout d'un tube de coquelicot.
Il rentre chez lui, comme à son âge nous rentrions de la piscine de Parmain, et n'a pas peur du sniper en allé avec la hausse du soleil sur la mer.
C'est lui qui coupe les cordons ombilicaux
des avenues mortes dans les dépouilles de carrefours et leurs éboulis aux proues de chimères.
Rencontre avec un pendu qui pend depuis le garde-fou d'un pont qui ne met plus rien en pont, qui nie même l'idée de circulation et radie, biffe, le génie bâtisseur syrien des chaussées d'antan, ravi de mettre à terre Potemkine et ses légendaires images de crépon.
Que dit l'image lorsqu'elle retourne les pierres des mots pelotonnés, en chiens du grésil, sur leur native faiblesse à la sourde pesanteur d'éclair foudroyé ?
Il y a un enfant, il y a des chats, blessés et mutilés, tout aussi courageux,
surpris de retrouver l'état sauvage de la guerre et le manque de noblesse des hommes pourtant fougueux.
Mohamed et Bedirxan jouent sans jouer à la souris avec les disparates housewives de l'Occident qui se caressent la moelle ondoyée
à coups de vidéos de قط.
L'abandon de toute civilisation semble être une quête,
les sangles en caoutchouc noires des déménageurs de piano accrochent leurs épaules aux membres disloqués des morts flanquant les trottoirs,
sous les tirs un homme les aspire vers lui pour les mettre à l'abri comme des Leichen de, dirait un enseignant retraité poète, térébrante mémoire.

Débriefing dont je n'ai pas pu savoir me passer :

M. Poutine, alors qu'il annonçait hier derrière les rideaux de son Kremlin le retrait de ses avions des tarmacs syriens, ressemblait à un parlementaire européen enfin coiffé selon les exclusifs préceptes d'un moderne Pierre le Grand -- on notait une raie virant du bon côté, délicieusement tiède et tropicale, comme le jet d'un jus de mangue intimement humecté d'une seconde fragrance rappelant la fleur d'oranger, que l'on aurait, au buvard, tapotée sur son front telle une mimique de jeu de rides inédit paraissant vouloir le dégarnir -- par une secrétaire qui doit ressembler à sa mère, un président s'éclaircissant nerveusement la voix, gorge comprimée d'une cravate qui mollifiait un buste méconnaissable que l'habilleuse aurait glissé d'un geste vif dans une chemise bleue modèle 1957 Traité de Rome, coupe 1965 des Postes & Télécommunications françaises. Par quel mystère le retrouvait-on devant notre écran avec cette tête de dernier communiant d'eurocratique essence et compliance ? Les dirigeants internationaux connaissent depuis toujours les trémulations d'ordre psychotique désaccordant les facultés de l'un ou de plusieurs des humains qui composent la famille Hafez El-Assad, clan affabulateur qui propagea la pieuse image du bouclier magique protecteur des minorités religieuses. Les Russes qui, comme à Cuba dans les années soixante, ont tout bâti là-bas, un irréel port vital, contracté mariages citrons avec l'encre d'autres blancs-seings, redit leur attachement pour le débouché méditerranéen, ricochet imparable venue sur la crête des flots du vol de la Crimée, tiennent à la Syrie pour bien d'autres raisons, plus profondes, qui font peut-être écho à l'histoire communiste du pays, une ère redevenue primordiale peau de chagrin pour recouvrir d'une nouvelle reliure les effets démoralisateurs des pauvres livres de compte recueils des différentes histoires de débâcles démocratiques et économiques, morales, narrations mesquines qui dévoilent en lettres de feu l'état de la société en général (et en amiral).

Les mêmes prétendus décideurs font sans doute exprès de ne rien voir de la catastrophe doctrinaire que transporta dans ses formules-valises l'impérialisme soviétique au coeur de cette région. Le prurit islamiste devait gicler un jour ou l'autre mais les cent mille patriotes qui défilèrent en septembre 2011 (pour ce que l'on nommera par une flagrante autant qu'indolente métonymie le "Printemps syrien") possédaient les moyens physiques et spirituels de l'endiguer, d'appliquer un cataplasme sur ses pores visqueux, si les chancelleries avaient eu le courage de leurs analyses et le désir de les aider. On se remémore quel 44e président des Etats-Unis, sans guère de goût naturel pour l'éthique de responsabilité, les abandonna en rase campagne, les offrit en holocauste aux moins-disants et aux plus-actants (tout cela avec un petit parfum d'Ypres, cadeau de ligne rouge à ne pas franchir, comme "il" -- saint-béni soit-il -- disait, avec son résineux sourire qui aurait fait saillir celui que révulsait la grimace, blanche comme le stigmate au tronc de l'hévéas, qui saignait la bouche d'une très ancienne compagne de François Hollande).

Car, que cela froisse les uns et les autres Huns, c'est la portion congrue de ce qui demeurait de la civilisation occidentale dans les sublimes paysages arabes, peuplés de magnifiques personnes qui ont tant à verser au monde d'aujourd'hui, que les alliés objectifs de Moscou, la jeune gâteuse, veulent voir disparaître. Les migrants, pas seulement les Chrétiens (dont le processus d'élimination est une donnée intellectuelle consignée depuis bien avant 1915 et qui court toujours), loin de là comme on s'en aperçoit tous, lorsqu'ils fuient les champs cardés par les peignes purificateurs des dictatures, les catastrophes écologiques, Timothy Snyder en fait trop là-dessus, elles existent depuis l'aube de l'humanité, la torture, les exactions, les viols, la corruption, l'encryptage des chemins vers la liberté, ses tristes mines, le fard de ses IEDs, ne choisissent pas de gagner la Russie ou la Chine , après tout ils le pourraient, les routes de la soie sont toujours tracées dans les deux sens, mais s'orientent vers l'Europe, l'ouest, grand nord mystique des Soufis, et toutes ses promesses de vie. Ils pourraient appeler à la rescousse les pensées de Kundera, Michnik, Havel et Milosz, eux qui savaient dans leur chair et leur esprit le poids de certaines actions, comme les décrivit Klemperer. Ils ne le font pas encore, mais qui sait si ce n'est pas pour lire entre les lignes de sa propre témérité retrouvée que l'on part aussi sur les routes.

À la tête, à la tête !
(Torture infligée par les milices pro-Assad, 
l'Armée de l'Islam ayant les mêmes pratiques)

(N.B. : dessin de fin d'article courtoisie de Katiouchka B.M., 8 ans)

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