dimanche 24 août 2014

Dans la peau noire et blanche d'Emmanuel Carrère le dimanche

340__Triptyque de l'Apostol Emmanuel,
cathédrale de la Dormition,
Omsk.


J'aime nous faire un peu de pain perdu le dimanche
j'ai horreur de laisser seule la boulange rassise,
un gâteau peut sauver le matin par la tranche
de son froment fruste, et nourrir les frères d'Assise.
Mon "Royaume" vient de sortir, la critique aussi,
est-elle unanime, que je la rêve assassine,
les professionnels ne prennent jamais les récits
personnels avec soin, qui revient aux racines,
ils étêtent les tiges, saccagent les baies des cassis,
comme les dômes des églises uniates clandestines,
et oublient les substrats fertiles dans leurs glacis,
par dépit, ils lapident le jardin de Custine.
J'aime lire la presse parlée, le matin du dimanche,
écouter la radio écrire ce qu'elle icônise,
cela change de la semaine passée en longues manches,
mon oreille goûte quand les journalistes ironisent,
la brièveté, dans le bon tempo, notre souci,
je l'endosse ce maillot marin du Potemkine,
moi aussi, n'empêche que faire long sur la Russie,
est l'axe fusain de mes carnets de moleskine.

C'est ce que ne pigent pas les grands critiques assis,
Ils ne voient pas que "Royaume" n'est oeuvre byzantine,
les noms Romand et Limonov fondent son "Ici
et maintenant", se shooter à la benzédrine
pour le comprendre n'est pas la nécessaire avalanche
qui fera fondre la lourde neige qui les asthénise.
Que ces deux golems en profitent pour prendre revanche,
je m'en fiche, ils rejoindront à temps leur remise,
je suis en voiture sur les parkings des dimanches,
et dans les vastes salles du métro, que Moscou vise
à déplacer à la surface pour meubler les hanches
trop larges des avenues vides comme en France les églises,
je suis-là pour Pavel et Luke, avec vous, un round,
my name"s Emmanuel, I live on the second floor,
yes, you've seen me before,

j'avais envie de les sortir de l'underground.
Dieu que mon précédent livre était noir épais
je racontais tout des bas-fonds de la capitale
je crois que les gens le prirent pour un coup d'épée,
au duel de Limonov, comme dans Guerre & Paix,
un pavé jeté dans la mire de son oeil pâle,
ah, les stupides ! je voulais juste faire histoire,
aujourd'hui on jouera la jurisprudence Moix
sur la table du jeu des grâces aux auditoires
pour contrer ceux qui abattent la carte du hoax,
les éditeurs ont les ressources que chacun sait,
mais j'eus aimé qu'à ma Malkhout on donne à boire,
Paul, Luc, mes Romanov & Limorand de craie,
mettent le noir du labeur de mon oeuvre au lavoir,
et me rendent Pantoscriptor du savoir frais,
celui de la connaissance par le "gouf" des soirs
de l'homme surpris au nord de la vie sans effets,
de l'âme qui préfère de son corps ne pas déchoir.
__Hélène, voulez-vous me passer le café, s'il vous plait,
les critiques me donnent soif au sein de leur pleuvoir.
Larrons en foire, mes compagnons de bordées,
ne saisissent pas que je cherche à dépétrifier
mon style des scories des premiers de cordées,
à le rendre blanc comme un oeuf prêt à nidifier
dans les arbres de la littérature simplifiée,
-- qu'ils accordaient pourtant à Céline à grand prix --,
je penche toujours vers ce gros livre désamplifié
par l'oubli, "La Forêt forteresse", de Zulawski,
C'est aujourd'hui le seul repère qui ne flanche,
bien qu'il soit bancal, dru comme le tournis à Pise,
de style touffu, surinterprétant les dimanches,
je regarde les images de son film par coeur apprises.